Un article paru le 28/10/2014 attire mon attention ......
"Mis sous pression par sa hiérarchie parce qu'il s'est moqué de la
politique numérique de l'école. Un professeur d'histoire-géographie de
Tourcoing (Nord), a supprimé intégralement vendredi 24 octobre son compte
Twitter et son blog. La raison? Un coup de fil de l'académie reçu dans la
matinée, qui l'informait qu'une demande de blâme venait d'être formulée à son
encontre à cause de son article, (raconte Le Parisien.)"
Extrait de "Au risque de me perdre" :
« Janvier 2005.pour la 1ère fois, c’est la fracture, ma 1ère
fracture !.. Le petit doigt de la main gauche…….Premier accident de travail
sérieux. Cela paraît dérisoire mais, je comprendrai par la suite que, même le
petit doigt est important………Il me rappellera ma négligence plus tard !
L’accident arrive un mardi, j’ai mal mais, continue à travailler……. Le
lendemain, le doigt n’est pas très beau. Je fais des radios le matin. C’est une
fracture. L’après midi, je suis au travail ! Je n’ai pas cherché la gloire en
agissant ainsi, j’ai simplement poursuivi mon métier. Je craignais de ne pas
être remplacée et que les enfants n’aient plus de cours d’EPS.
Je ne demandais rien simplement un minimum de considération. Mais, je
comprendrai bien plus tard que je n’avais rien à espérer de personne et surtout
pas de la hiérarchie !
Le
rendez-vous
« L'espoir est
bien court qui n'occupe que l'espace d'un rêve . » Marguerite Beaudry
Je m'installe sur une chaise alors qu'elle prend place face à moi
derrière son bureau et ce qui aurait dû être un entretien convivial devient un
pugilat de mots !
« Bonjour » lui dis-je. « Vous connaissez le problème qui m'amène ?
- Je connais votre situation » me répond-elle.
« Comme vous le savez, l'emploi
adapté m'a été refusé comme me l'a appris le syndicat en mettant en avant le
problème de l'âge. Ce que je considère injuste et discriminatoire.
- Normalement » m'a-t-elle dit, « ils n'avaient pas à vous le dire. Le
secret n'a pas été conservé, ce qui met les personnels dans une grande
difficulté. Cela n'a pas été évoqué dans un sens péjoratif.
- Je l'ai ressenti ainsi. Lorsque j'ai demandé la raison il m'a été
répondu que mon âge avait été évoqué et que, vu que c'était un accident de
travail, une pension me serait donnée qui compenserait mon manque d'annuités.
Pension qui n'était pas imposable ! Je ne mendie pas ! je demande du travail !
- Madame, ne nous trompons pas de combat. Demander du travail est votre
droit. »
Heureusement ! ai-je pensé ! Mais, je me suis abstenue de tout
commentaire. La situation me semblait assez explosive, j’ai jugé plus
raisonnable de conserver mon calme….
Et, la conversation se poursuit :
« - D'une part, je n'ai pas les annuités, d'autre part, je ne désire
pas m'arrêter et, enfin, j'ai des emprunts qui ne me permettent pas de
m'arrêter !
- Dans la vie », me dit-elle, « on fait des choix. Vous, vous avez
choisi d'emprunter, c'est votre droit mais, l'administration ne peut pas
prendre en compte les choix de tous ces personnels sinon, on n'en sort pas, on
va travailler jusqu'à 80 ans ! Le personnel de la catégorie A peut prendre sa
retraite à 60 ans et continuer jusqu'à 65 ans.
- C'était mon désir si je n'avais pas eu cet accident !
- C'était votre droit mais, l'administration a aussi des choix à faire.
Quand on a quelqu'un qui a cinq ans d'ancienneté, qui visiblement a fait une
erreur de casting, qu'il faut réorienter, et la réorientation devient de plus
en plus difficile car des erreurs de casting, il y en a de plus en plus et,
quand on a d'un autre côté, quelqu'un qui n'a pas les annuités mais, est à 1 ou
2 ou 3 ans de la retraite, et qui pourrait puisqu'il s'agit d'un accident de
travail prétendre à une rente…. le choix est là puisqu'on n'a pas de poste pour
tout le monde ! Le choix, on le fait par défaut, et, ça ne nous ravit pas non
plus.
- Honnêtement, je le ressens comme de la discrimination. Je considère
que c'est mon droit de continuer à travailler. Parce que je n'ai pas voulu
quitter mon poste, laisser mes élèves, j'ai continué à travailler pendant deux
ans jusqu'à ce que mon poignet se mette à lâcher. Vous trouvez que c'est normal
qu'on vous jette à la poubelle comme cela ? Je suis prête à saisir la HALDE
s'il le faut, aller à la presse si nécessaire parce que je trouve cela injuste
!
- Vous pouvez aller à la HALDE » me dit-elle « qui peut dire qu'on a
mis l'âge en avant ? Cela a été dit oralement, comment le prouver ?
- Je demanderai les raisons.
- A mon avis, votre âge ne figurera pas. On a un contingent de postes
et un choix à faire et, entre une personne de trente ans qui est mal parce
qu'elle a fait une erreur de casting et qu'il faut réorienter et vous, on
choisit.
- De toute façon, le médecin des accidents de travail a fait un rapport
m'interdisant pour l'instant l'EPS mais, il me juge capable d'intervenir dans
un autre poste.
- Je me suis renseignée auprès des inspecteurs d'EPS » me répond-elle «
et, le fait que vous ne puissiez effectuer les parades, etc.… n'est pas une
contre indication. Les élèves peuvent assurer la sécurité à votre place du
moment où vous leur avez expliqué le geste !
- Attendez, j'ai un doigt raide, je peux me faire mal à tout moment,
aussi, j'ai ouvert sur d'autres postes. Je suis prête à me déplacer, faire des
remplacements comme Conseiller d’éducation(CPE), etc….je pense que je fais mon
possible ! Je m'efforce de ne pas bloquer l'administration avec un choix
précis.
- La MGI ? c'est en cours ? » me dit-elle.
« - Oui, en bénévolat. Mais…. après ?
- Il faut vivre au jour le jour ! Dans la mesure où c'est possible en
bénévolat pour le moment, il faut prendre.
- Si j'avais eu un poste adapté, cela aurait pu durer et, la MGI
m'aurait gardée !
- Bien sûr, c'était tout « bénef » pour eux. Vous étiez payée comme
prof ! En demandant un poste adapté, vous n'étiez pas sûre de l'avoir.
- Je sais bien, mais, qu'on me trouve autre chose. Mon principal
voulait me prendre comme CPE et est prêt à faire un rapport dans ce sens.
- Nous n'avons pas eu le rapport du médecin.
- La commission a eu lieu mardi, vous allez le recevoir. Je revois le
chirurgien le mois prochain et, je vais peut être repartir sur une autre
opération. Je suis, honnêtement, révoltée !
- Vous avez fait une erreur qu'il faut constater. Quand on a un
accident, on s'arrête, surtout, quand on est prof d'EPS ! On aurait envoyé un
remplaçant !
- N'importe quel prof d'EPS vous dira qu'on ne s'arrête pas pour un oui
ou un non et, quand vous me dites, de laisser faire les élèves, de les laisser
se parer, tous les profs vous diront qu'un gamin de sixième perché sur des
barres vous appelle. Faut-il le laisser tomber ?
- Vous n'êtes pas raisonnable !
- C'est vrai mais, je suis comme beaucoup, on ne s'arrête que lorsqu'on
ne peut plus !
- Vous mettez l'administration en difficulté pour vous proposer autre
chose car, on est en réduction de poste. Vous avez pris en ne vous arrêtant pas
une part de responsabilités !
- Combien il y en a dans mon cas qui s'arrêtent au dernier moment parce
que continuer n'est plus possible ?
- Et bien, ce n'est pas une bonne chose !
- Combien de fois, j'ai travaillé avec une gastro en appelant mon
collègue afin qu'il s'occupe de mes élèves quand je me sentais mal ?
- Moi, j'ai eu peu de congés de maladie, j'en ai eu une et, je me suis
arrêtée !
- Pas nous ! Les trois quarts sont comme cela ! J'ai des collègues avec
hernie discale qui se sont arrêtés au dernier moment. On apprenait le lendemain
qu'ils étaient opérés en urgence !
- Nous sommes dans une drôle de situation parce que je ne vois pas bien
ce que l'administration va vous proposer...
- J'ai ouvert sur beaucoup de postes. Ms l'Inspecteur d'Académie a
trouvé bien que je sois prête à être CPE et, si vraiment mon âge était un
problème, si je ne m'en sentais pas capable accepterais-je de me déplacer pour
faire des remplacements ?
- Avez vous vu des inspecteurs pour voir les possibilités de
reconsidérer les activités ? En danse, vous n'auriez pas de problèmes !
- Oui… danse toute une année ? Quand vous avez travaillé plus de 35
ans, et qu'on vous traite ainsi, je refuse de laisser faire ! En reculant l'âge
de la retraite, il est certain que ce problème va se reproduire et s'amplifier
!
- Ça, ce n'est pas notre problème ! Vous devez penser à vous. Il y a
d'autres instances pour réfléchir à ça !
- Je suis désolée mais, je pense aussi aux autres !
- Moi, je vais me renseigner, voir s'il y a un poste de CPE vers lequel
vous pourriez être envoyée. Je vais m'occuper de cela. Mais, vous arrivez à
conduire ?
- J'ai été opérée début octobre et une semaine après, je prenais le car
pour aller aider à l'UNSS avec une broche dans la main !
- Vous êtes un peu « kamikaze » !
Sa réflexion m'amuse et m'agace à la fois ! Sillonnerai-je le Sénégal
comme je le fais, serai-je prête à aller les aider là bas si je n'étais pas un
peu… kamikaze ???
« Je ne supporte pas d'être payée à rien faire, ça me culpabilise ! Il
suffisait de me mettre sur un autre poste et, on économisait un salaire. A une
époque où on parle beaucoup d'économie, je trouve cela un peu choquant de la
part du service public !
- Et à la retraite, que ferez-vous ?
- Quand je n'aurais plus de crédit et pourrais m'arrêter je partirai
faire de l'alphabétisation en Afrique !
- Si vous aviez à faire à quelqu'un de plus raide, on vous dirait que
dans le statut des fonctionnaires il n'est pas écrit qu'il faut être
propriétaire de son logement, on n'a pas à assumer votre choix !
- Oui, mais alors, j'aurais un loyer et, aussi cher que mes crédits ! »
Gaby hausse les épaules à l'évocation de tels propos et me dit :
« Faut-il aller dormir sous les ponts pour être dans les normes ? »
Et, la conversation se poursuit ainsi pendant près d'une heure ! Je
suis partie effondrée !
« Je vais essayer » me dit-elle « de trouver une solution pour trois
ans et après… vous partirez !
- Poubelle ! La vieille… » ai-je pensé alors !
« Ces propos là » me dit alors Gaby, « elle ne peut les nier, c’est
désarmant ! »
Elle ne m'en dira pas plus. Qu'a-t-elle encore bien pu faire ? Elle
semble si sûre d'elle !
Le lendemain, elle rencontre une médecin de la MDPH (maison
départementale du handicap).
Au retour, Gaby est un peu plus optimiste :
« Elle est très consciente de mon problème actuel. Elle considère que,
pour l'instant, travailler en EPS est dangereux et, elle m’a dit qu’avant tout,
avant de penser aux élèves, il fallait que je prenne conscience que cela
représentait un réel danger pour moi ! Pour elle, je suis une vraie
« Don Quichotte » ! Comment oser s'opposer à un système aussi protégé ?
Comment oser se battre ainsi ? En la quittant, elle m'a dit « Bravo et bon
courage » ! Par la suite, mon handicap
en EPS me sera reconnu. Je suis désormais « à ménager » ! »
Le soir même, à la télévision, la ministre du travail Christine
Lagarde, présente une nouvelle loi. Elle veut remettre les chômeurs au travail
! Elle est prête à lever la dispense de recherche d'emploi pour les chômeurs de
plus de 57ans et demi, estimant qu'à cet âge là « on n'est pas fichu, on peut
retrouver un emploi » ! Depuis 1985, il n'était plus nécessaire à cet âge là
d'effectuer les démarches demandées aux autres demandeurs d'emploi.
Gaby écoute l'émission avec beaucoup d'intérêt.
« Moi, qui suis en accident de travail et, en pleine forme…. que me
propose-t-on ? RETRAITE ! honteux ! Un service qui devrait donner l'exemple !
Je suis révoltée, mais, je ne laisserai pas faire ! Je ne risque plus rien dans
de telles conditions alors, si je ne me bats pas pour moi, ça servira peut être
aux autres ! »
Lundi 16 juin à 10h, elle est à nouveau dans le bureau de l'adjoint
DRH.
Il l'écoute mais, il est aussi désemparé qu'elle parce qu'il ne trouve
pas de solution. Le système est enfermé dans un cadre et n'arrive pas à en
sortir ! Elle est « hors cadre » aussi,
il ne sait que lui proposer. Il est là, ce fameux « mammouth », il n'arrive pas
à bouger quand il se trouve face à un cas qui n'est pas coutumier, un cas qui
veut le faire sortir de son immobilisme si confortable et si rassurant !
La seule solution vient d'en haut !
Qu'une adaptation soit faite par rapport à chaque cas, que des
dérogations soient données ! Que des emplois adaptés soient proposés à des
personnes proches de la retraite.
Que ce fameux livre vert soit autre chose que des mots mais des actes
concrets et, on pourra alors faire confiance à un ministre !
Jeudi 26 juin : Elle rencontre à nouveau la médecin du rectorat, aussi,
interrogative sur les solutions que l'adjoint DRH !
Une autre opération est prévue fin août. Qu'elle reprenne en EPS si
elle peut, qu'elle s'arrête quand ça ne va pas, qu'elle demande un mi-temps
thérapeutique. Elle ne voit pas la solution… il n'y en a pas !
La rentrée prochaine ? C'est un grand point d'interrogation ?
Les vacances sont là. Cela va-t-il calmer les choses ?
Mardi 4 novembre 2009 : un article sur Internet attire l'attention :
« Le gouvernement a lancé mardi une opération destinée à diffuser à
compter de 2009 « une batterie de bonnes pratiques » des entreprises pour
l'emploi des seniors. Le ministre du Travail Xavier Bertrand a rappelé qu'il
fallait discuter de l'emploi des seniors dans toutes les entreprises en 2009,
notamment des conditions de travail, de la formation, de la rémunération, et,
les entreprises qui refuseront de le faire seront sujettes à pénalité à partir
de 2010. »
Que va faire Xavier Darcos maintenant qu’il est Ministre du travail ?
Désormais, le maçon est au pied du mur !
Y aura t-il pénalité pour le service public et l'Education Nationale en
particulier ? »
« On n'a pas converti un homme parce
qu'on l'a réduit au silence. » (Christopher Morley)
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